Mobilité européenne et protection sociale des bénéficiaires de contrat de professionnalisation maritime
En France, l’apprenti ou le bénéficiaire d’un contrat de professionnalisation est reconnu comme
un salarié et bénéficie de la couverture sociale liée à ce statut. Toutefois, ce statut peut changer
dans le contexte de la mobilité européenne avec des conséquences importantes en terme de protection sociale.
Afin de lever les freins à la mobilité des apprentis en Europe et dans la lignée de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, des travaux ont été menés afin de favoriser la mobilité européenne des apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation pendant leur formation ou apprentissage
Protection sociale des élèves et étudiants maritimes en contrat d’apprentissage
Les élèves des lycées professionnels maritimes et les étudiants de l’Ecole National Supérieure Maritimes en contrat d’apprentissage, de professionnalisation ou d’engagement maritime sont affiliés auprès du Régime de sécurité sociale des marins qui leur garantit la couverture des risques liées à la maladie et maternité ainsi que les accidents du travail et maladie professionnelle.
Les dispositions des règlements communautaires CE 883/2004 et 987/2009, portant coordination des systèmes de sécurité sociale, viennent préciser la législation applicable à ces personnes et les mécanismes de coordination permettant de garantir la continuité de leur couverture sociale dans l’État d’accueil
Mobilité au sein de l’Union Européenne
Les articles L. 6222-42 et L. 6325-25 du code du travail prévoient ainsi que, lorsque l’apprenti ou le bénéficiaire d’un contrat de professionnalisation partant en mobilité dans un État membre de l’Union européenne autre que la France ne bénéficie pas du statut de salarié (ou assimilé) dans son État d’accueil, alors sa couverture sociale sera régie par le code de la sécurité sociale
Cette suspension du contrat de travail est obligatoire pour les projets de mobilité longue (supérieure à quatre semaines), tandis que pour les mobilités plus courtes, l’employeur français peut choisir de maintenir actif le contrat de son salarié pendant cette période
Lorsque le contrat de travail reste actif, la mobilité des alternants concernés devra être considérée comme un séjour temporaire dans un autre État membre pour raison professionnelle. Leur couverture sociale française, en tant que salarié, ne sera donc pas affectée par cette mobilité.
En revanche, lorsque l’employeur français suspend le contrat d’apprentissage ou de professionnalisation de son salarié, deux situations peuvent se présenter :
- Soit la législation sociale de l’État d’accueil reconnaît ces personnes comme des salariés ou assimilés et les bénéficiaires relèveront du régime de sécurité sociale de cet État en application des règlements communautaires
- Soit ils ne sont pas considérés comme salariés dans l’État d’accueil
Leur couverture sociale est alors incertaine dans cet État, faute de statut pouvant conduire à une précarité du bénéficiaire.
C’est pourquoi, pour pallier cette difficulté, les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation, dont le contrat de travail français sera suspendu le temps de leur mobilité dans un État membre de l’Union européenne et qui ne seront pas salariés dans leur État d’accueil, devront être considérés comme des étudiants.
En effet, les règles de coordination européenne pour la protection sociale prévoient que la législation sociale applicable aux étudiants est celle de l’État de résidence, contraire aux salariés dont l’affiliation s’opère sur critère professionnel.
La résidence est ici déterminée non pas au regard du lieu d’habitation mais des centres d’intérêt de la personne et plus particulièrement, la source de ses revenus.
Néanmoins, parfois la frontière entre le statut de salarié et celui d’étudiant est mince pour ces alternants qui partent en mobilité afin de compléter leur formation théorique et pratique française en Europe.
En tant qu’« étudiants », les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation qui partent en mobilité dans un État membre de l’Union européenne bénéficieront donc de la couverture sociale française dévolue à ce statut : assurance maladie, maternité, accident du travail et maladie professionnelle, le cas échéant, complétée par une assurance volontaire vieillesse et invalidité.
Dans cette situation et depuis la réforme de 2019, les élèves des lycées professionnels maritimes et les étudiants de l’Ecole National Supérieure Maritimes en mobilité au sein de l’Union Européenne et qui ne sont pas considérés comme salariés dans l’État d’accueil :
- De moins de 24 ans seront affiliés au régime d’un de leurs parents pour leur couverture maladie et maternité, et au régime général en cas d’accident du travail ou maladie professionnelle
- De plus de de 24 ans seront affiliés au Régime Général pour leur couverture maladie, maternité, et en cas d’accident du travail ou maladie professionnelle.
Assurance maladie et maternité
Les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation maritime, qui ont moins de 14 ans et seront considérés comme étudiants avec une affiliation au régime de sécurité sociale des marins le temps de leur mobilité, devront faire parvenir à l’Enim un courrier informant de la suspension de leur contrat de travail, ceci dans un délais maximum de deux semaines avant le départ dans un autre Etat membre.
Ils basculeront donc, pendant cette période, d’une affiliation sur critère professionnel à une affiliation sur critère de résidence.
Pendant leur mobilité, ces personnes auront droit à la couverture maladie et maternité garantie aux étudiants (identique à celle applicable aux résidents) et bénéficieront de la prise en charge de leurs frais de santé par le biais de la carte européenne d’assurance maladie
Par ailleurs, en cas de maladie ou de maternité, des indemnités journalières pourront leur être octroyées au titre du maintien de droit en application de l’article L. 161-8 du code de la sécurité sociale.
Ce maintien de droit ne peut être appliqué que dans la mesure où des droits ont été ouverts lorsque ces personnes bénéficiaient du statut de salarié.
Deux semaines avant leur retour en France, les alternants en mobilité informeront leur caisse d’assurance maladie française de la réactivation de leur contrat de travail français. Ils basculeront donc d’une affiliation sur critère de résidence à une affiliation sur critère professionnel.
Assurance accident du travail et maladie professionnelle
Quel que soit leur âge et depuis 2019, les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation maritime considérés comme étudiants ne sont pas affiliés au régime de sécurité sociale des marins mais le sont auprès du régime général.
Les accidents survenus sur le parcours direct entre le lieu de travail et la résidence ou l’établissement d’enseignement relèveront également de la législation relative aux accidents du travail.
En revanche, le bénéficiaire du contrat de professionnalisation ou d’apprentissage en mobilité ne bénéficiera pas d’indemnités journalières en cas d’AT/MP
Comme pour la couverture maladie et maternité, ces personnes doivent prévenir leur caisse d’assurance maladie française du lieu de résidence (CPAM) de ce changement
Assurance vieillesse
La couverture sociale des étudiants ne comporte pas de volet vieillesse ou invalidité.
Afin d’acquérir des droits, notamment à la retraite à faire valoir à la fin de leur carrière professionnelle, les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation peuvent adhérer, le temps de leur mobilité, à l’assurance volontaire invalidité – vieillesse
L’adhésion à l’assurance volontaire pour les risques invalidité et vieillesse-veuvage, est conditionnée à deux critères :
- Avoir été affilié pendant au moins six mois à un régime obligatoire de sécurité sociale en tant que salarié
- Cesser de remplir les conditions d’assujettissement obligatoire à ce régime
Ainsi pour pouvoir demander cette assurance volontaire, les apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation qui partent en mobilité doivent :
- Avoir été salarié pendant au moins six mois continus avant leur mobilité que ce soit en tant qu’apprenti, bénéficiaire de contrat de professionnalisation ou salarié
- Avoir un contrat de travail français mis en veille et ne pas obtenir le statut de salarié dans l’État d’accueil
La demande d’adhésion doit être effectuée auprès de la caisse primaire d’assurance maladie du lieu de résidence en France
Cas d’exclusion
Le dispositif ne peut être utilisé que dans le cadre juridique des règlements européens de coordination. Or, la mobilité des apprentis et bénéficiaires de contrat de professionnalisation peut être effectuée dans un État tiers, hors de l’Union européenne
Dans cette situation, la couverture sociale de l’alternant en mobilité dans un État tiers dépendra de la législation sociale de son État d’accueil et des dispositions de la convention bilatérale de sécurité sociale lorsqu’elle existe.
Pour compléter cette couverture, le bénéficiaire pourra avoir recours à la Caisse des français de l’étranger ou à une assurance privée
A noter qu’au titre de mobilité courte hors Union Européenne, généralement trois mois, les bénéficiaires restent couverts par le régime de sécurité français au titre du détachement, à la condition que le contrat de travail français reste actif et que l’Etat d’accueil soit conventionné avec la France ou que l’employeur s’engage à s’acquitter de l’intégralité des cotisations dues.